Aujourd’hui, j’ai décidé deux ans après de vous parler de mon IVG. Si je prends la parole à ce sujet maintenant, c’est parce que nous sommes le 28 septembre et aujourd’hui, c’est la journée mondiale pour le droit à l’avortement. J’ai envie de défendre ce droit à la libre disposition de notre corps mais pas seulement. En 2021, ce droit est encore remis en cause en France et dans certains pays, il est tout simplement banni.
« J’ai eu recours à l’avortement en octobre 2019, voici mon histoire. »
Pour diverses raisons, plus jeune, je n’avais pas envie d’avoir d’enfants. C’était le discours que je soutenais auprès de mes proches car je me disais que nous étions assez nombreux sur la planète, j’avais aussi peur pour l’avenir de la génération future avec tous ces changements climatiques. Bref, j’avais tout un tas d’idées arrêtées, mais comme on dit, il n’y a que les idiots qui ne changent pas d’avis !
J’avais 22 ans quand je me suis mise avec Nicolas et nous nous sommes installés ensemble un an plus tard. Nicolas m’a très rapidement évoqué l’envie et le souhait d’avoir un enfant. Au sein de notre relation, il y a toujours eu une sorte de décalage. De part son vécu passé, mais aussi notre petite différence d’âge (3 ans). En avançant dans ma vie d’adulte à ses côtés, mes envies d’enfant ont évolué dans son sens mais pas au même rythme que lui.
Côté contraception, j’ai toujours eu des soucis et actuellement c’est encore compliqué. J’ai été tranquille durant 3 ans avec la pilule Cerazette, puis un jour mon corps a décidé de la rejeter en bloc ! Je passais parfois 1 mois avec des règles… J’ai alors essayé durant 9 mois le stérilet hormonal car j’ai toujours eu des règles compliquées, mais ça n’allait toujours pas. Alors, en accord avec Nicolas et mon médecin, en mai 2019, je l’ai fait retirer et j’ai enchaîné sur une pause contraceptive, retour au préservatif. Toutefois, j’avais été assez clair avec Nico sur le fait que si par mégarde il y avait un « accident », l’avortement serait non négociable. Je n’étais pas prête, un point c’est tout.
Je sais bien que l’on est « jamais prête »(je l’ai tellement entendu celle-là !), toutefois entre désirer un enfant et être prête il y a une différence et pas des moindres. Selon ma vision personnelle, un enfant, c’est un engagement pour la vie. Pour moi, être « prête » c’est d’une part désirer la grossesse, avoir une bonne stabilité professionnelle et personnelle, afin d’accueillir cet enfant dans les meilleures conditions. Enfin c’est un choix que l’on prend à deux.
Le contexte familiale dans lequel j’ai grandi joue un rôle prédominant dans ma réflexion à ce sujet, j’ai beaucoup souffert de la séparation de mes parents.
Le 28 septembre 2019, nous étions un samedi, j’étais super fatiguée depuis plusieurs jours et sans exagérer j’avais les seins gros comme des pamplemousses, Nicolas, me dit : tu ne serais pas enceinte ? WHAT ? Pour moi, c’était juste impensable, mais dans le doute, Nicolas est allé acheter un test de grossesse.
De retour avec son test, me voilà en plein après-midi, à faire ce test… C’est là que j’ai découvert les fameuses deux barres…
J’ai appelé Nicolas et je lui ai fait part du résultat, il semblait si heureux , ça en été déroutant, alors que pour moi c’était clairement la fin du mooooonde !! Je l’aime du fond du coeur mais nous avions encore bien des choses à vivre à deux, avant de mettre au monde un petit être.
S’en viennent ensuite trois longues semaines de procédure pour avoir recours à l’interruption de ma grossesse, un calvaire.. !
Ça n’a pas été une épreuve simple pour notre couple car Nicolas été assez partagé et tiraillé par son envie d’être papa et quant à moi, j’étais complètement fermé à l’idée.
Le lundi qui suivait, j’avais prévu d’aller rendre visite à ma mère, et malgré la situation, je n’ai pas annulé mon déplacement. Très vite, j’ai exposé la situation à ma maman. Elle qui m’avait eu à 25 ans, n’a pas pu s’empêcher de me dire : tu es sûre de ton choix ? Bien sûr que OUUUI je suis sûre ! Elle a respecté ce dernier et elle m’a accompagné pour les premiers rendez-vous (médecin, prise de sang, et enfin l’échographie afin dater la grossesse 6 SA).
Au départ, je souhaitais avoir recours à l’IGV médicamenteuse, mais d’une part j’étais assez limite niveau timing et d’autre part mon état psychologique était assez catastrophique. La médecin a jugé qu’il était préférable que je procède à une IVG à l’hôpital. J’ai pu être prise en charge par Bagatelle à Talence (« mon lieu de naissance »). Je vivais très mal la situation et j’avais hâte d’en découdre. À l’époque, j’ai tu mon état et la situation sur les réseaux sociaux. Moralement, j’étais vraiment à fleure de peau entre les vomissements et la fatigue.
J’ai eu beaucoup de chance car mon entourage a respecté mon choix sans me juger. Mon père a été d’un très grand soutien également, avec Nicolas, ils m’ont tout deux accompagné pour mon entrée à l’hôpital le jour de l’IVG.
Ce jour a été particulièrement traumatisant pour moi, ce n’est jamais anodin une anesthésie générale, de plus je trouvais ça très glauque de devoir aller à l’hôpital pour ça. Deux ans après, je me souviens encore du moment où le brancardier est venu me chercher, jusqu’à ce que l’on m’endorme, je n’ai pas arrêté de pleurer. Des litres de larmes se sont écoulées, pleine de regrets envers moi même, je m’en voulais beaucoup d’être tombé enceinte et j’aurai simplement aimé ne pas avoir à vivre un avortement.
« J’avais 25 ans et à 25 ans, je rêvais tout simplement d’autre chose que de maternité. »
Je n’ai jamais regretté mon choix et les événements de la crise sanitaire n’ont fait que confirmer ma décision.
Aujourd’hui, avec Nicolas on parle bébé mais pas avant 2 ans. On achète déjà une maison cette année et on se laisse le temps de prendre nos marques et avant de se lancer dans cette grande aventure qu’est la parentalité. Si ça ne tenait qu’à Nicolas, on aurait déjà un enfant. Pour lui, c’est compliqué de patienter, j’en ai conscience mais on ne fait pas un enfant pour faire plaisir à l’autre, on le fait à deux. Dans notre couple ça à souvent été un sujet qui a animé nos disputes, j’ai eu beaucoup du mal à m’ouvrir et à le rassurer. Aujourd’hui notre couple est apaisé et je sais que ce que nous avons vécu nous a renforcé.
J’ai ouvert mon coeur par ici pour me confier à ce sujet parce que nous devrions toutes avoir le choix pour notre corps. L’accès à l’IVG est marqué d’inégalités. Dans le monde 40% des femmes en âge de procréer ne disposent pas du droit à l’avortement. Dans certains pays, on revient même en arrière en retirant ce droit aux femmes.
En France ce droit a été acquis le 17 janvier 1975 par la loi Veil, l’IVG est remboursé à 100% depuis 2013 pour toutes les femmes et les délais varient en fonction de la méthode.
Jusqu’à 7 semaines après le premier jour des dernières règles pour l’IVG médicamenteuse à domicile et 14 semaines (d’aménorrhée) après le premier jour des dernières règles pour l’IVG instrumental.
♥
12 Comments
Astrid (Rhapsody in Green)
28 septembre 2021 at 13 h 33 minCoucou Amélie, merci beaucoup de prendre la parole sur ce sujet si sensible, tu es très courageuse. J’imagine bien que cela a dû être une épreuve très difficile, mais comme tu le rappelles : c’est TON choix (et je suis folle de rage en pensant que les droits à l’avortement reculent dans certains pays). J’aurais probablement fait le même choix si cela m’était arrivé « trop » jeune. Je te fais plein de bisous. Et tu es magnifique, la série de photos est superbe !
Amélie Tauziede
29 septembre 2021 at 13 h 47 minHello Astrid, merci infiniment pour ta lecture 🙂
Si tu savais comme moi aussi ça me rend folle de me dire que l’on peut revenir sur ce genre de chose en 2021 !
Même chez nous en France, il reste fragile et on doit encore se battre pour le conserver… juste merci <3
Nadine
28 septembre 2021 at 18 h 33 minJuste plein d’admiration pour ton courage <3
Amélie Tauziede
29 septembre 2021 at 13 h 34 minMerci Nadine pour ton message <3
Stephanie D
28 septembre 2021 at 18 h 56 minBonjour Amelie,
Très courageux ton histoire et ton article! J’admire ta prise de parole ! Ton choix ne regarde que toi!
Amélie Tauziede
29 septembre 2021 at 13 h 44 minMerci Stéphanie pour ta visite et lecture
Brugiere
28 septembre 2021 at 19 h 08 minMerci pour ton courage d’avoir dévoilé votre côté intime avec Nicolas.
Bravo pour ta sincérité ; le meilleur est devant vous ♥️♥️♥️♥️
Amélie Tauziede
29 septembre 2021 at 13 h 41 minMerci à toi, j’ai de la chance qu’il accepte que je prenne la parole à ce sujet car ça nous concerne à tous les deux et c’est notre histoire, je lui en suis vraiment reconnaissante. Oui c’est certain, on avance doucement mais surement <3
Marine
28 septembre 2021 at 19 h 30 minMerci pour ce témoignage ouvert, même si le droit a l’IVG est respecté en France et qu’il y a beaucoup de bienveillance dans ton entourage, ce n’est pas évident de sauter le pas et d’en parler. Bravo à toi.
Amélie Tauziede
29 septembre 2021 at 13 h 39 minbonjour Marine,
Merci à toi pour ces mots !! En effet, j’ai eu de la bienveillance dans mon entourage mais même si je ne me suis pas exprimé à ce sujet, je n’en ai pas forcément eu en vers le certains corps médical. Après ça c’est la faute à pas chance, ils ne sont pas tous comme ça heureusement 🙂
Aude
29 septembre 2021 at 6 h 56 minMerci Amélie de prendre la parole sur le sujet. Ça reste encore tellement tabou alors qu’une femme sur 4 y a recours dans sa vie…
Malheureusement il y a encore tellement de jugements à ce sujet, que c’est d’autant plus courageux de ta part de prendre la parole.
Je t’embrasse et te souhaite plein de bonheur dans tes futurs projets 🙂
Amélie Tauziede
29 septembre 2021 at 13 h 43 minMerci Aude pour ta lecture et merci d’être toujours présente par ici 🙂